35 ans après sa disparition (23-09-89/23-09-24), Kléber Dadjo demeure un architecte méconnu de la paix au Togo, pays dont il a présidé les destinées en quelques mois (14 janvier-14 avril 1967), avant de céder le pouvoir suprême, sans heurt, et à cœur joie, à Gnassingbé Eyadéma. Chose si rare qui suffit pour justifier le très haut attachement de l’homme à la paix et à la réconciliation.
Dans une interview que l’on peut considérer comme une mine d’informations sur le pan de l’histoire écrit par Kleber Dadjo, Ras Dadjo, président de l’Association Kléber Dadjo pour la paix éclaire l’opinion togolaise sur la vie et l’engagement de Kléber Dadjo, figure emblématique de l’histoire politique et militaire du Togo, un modèle pour les générations futures.
Cette interview est un précieux témoignage pour mieux comprendre le rôle-clé de Kléber Dadjo, militaire, homme d’État et semeur de paix, dans l’histoire du Togo. La grande leçon à tirer de ce riche récit est que la vie de Kléber Dadjo est un héritage à préserver, un appel à hisser l’unité et la paix au-dessus de tout intérêt et de toute considération.
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Vous avez toujours souligné avec force les vertus de paix de l’ancien chef d’État, feu Kleber Dadjo, que vous qualifiez de ” obsédé de la paix”. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Il faut rappeler que feu Kléber Dadjo, après avoir été reconnu unanimement comme un génie militaire et un fin stratège par l’armée française, a regagné sa terre natale, le Togo, en 1955, avec comme mission de bâtir l’armée togolaise. Il était l’officier togolais le plus gradé avec des états de services très respectés par l’ex colonisateur (la France). Il a mal vécu les divisions de la classe politique de 1963 jusqu’au 12 janvier 1967, car, lui qui connaissait les affres de la guerre, n’en voulait pas une sur la terre de nos aïeux.
Il exprimait sa préoccupation quant à la situation politique complexe du Togo et soulignait l’importance d’une approche prudente et réfléchie pour éviter des conséquences imprévues. Reconnaissant les défis auxquels le pays était confronté et les efforts de nombreux acteurs politiques de l’époque, c’est avec un profond sens du devoir envers la Nation togolaise qu’il accepta de prendre la tête du Comité de réconciliation togolais le 13 janvier 1967. L’accent mis sur la “Réconciliation” à cette période est particulièrement significatif. En fait, nous sommes en train de nous documenter sur les engagements et les responsabilités des acteurs de cette époque et les premiers éléments en notre possession prouvent/indiquent que Kléber Dadjo, aux côtés d’autres figures importantes, a joué un rôle considérable dans la promotion de la paix au Togo.
Après sa carrière militaire et ses hautes fonctions, il s’est offert une retraite bien méritée. Comment occupait-il sa retraite?
Durant sa retraite, il a continué à s’instruire à travers les ouvrages et les livres dans les domaines de la gouvernance mondiale, dans les domaines des sciences morales et des forces spirituelles qui fondent la société (ex. : il se référait régulièrement à la Bible dans ses argumentaires). C’est dans ce contexte et depuis son village, Siou, qu’il a affirmé sa vision de l’action publique : faire de la jeunesse des ambassadeurs de la paix aux différents échelons de la gouvernance. Il n’était pas fortuné, mais il dépensait une bonne partie de sa pension pour animer des activités sportives locales et régionales. Les matchs de football étaient pour lui un moyen de briser les méfiances et de tisser des relations amicales entre les communautés. Il œuvrait activement pour l’organisation des tournois de football entre les militaires et les civils. Ces évènements créaient de nouvelles dynamiques entre les populations et les militaires. Les populations comprirent que les militaires étaient présents pour leur sécurité et, de manière naturelle, elles allaient vers eux pour signaler tout mouvement suspect ou inhabituel dans la cité.
Nous disposons plein de témoignages à citer sur les graines de paix que le feu Kléber Dadjo ensemençait dans l’espace public, mais aujourd’hui, nous comprenons qu’il utilisait la jeunesse, le sport pour semer cette paix dans la cité.
La présidente du HCRRUN œuvre pour la mise en œuvre de la recommandation n° 46 de la CVJR relative « aux hommages à rendre à certaines personnalités disparues qui ont occupé des postes de responsabilité importante et rendu service à la nation togolaise ». « Un obstacle a été franchi dans le dossier de feu colonel Kléber Dadjo, ancien chef de l’État. Un site a été identifié et retenu pour accueillir à Siou les cérémonies d’hommages en perspective. », déclarait-elle le 21 décembre 2023. Votre association accompagne-t-elle cette initiative du HCRRUN ?
Le président de la République a inscrit la paix comme valeur cardinale de son action à la tête de l’État. Dès lors, la Commission vérité, justice et réconciliation a été un moyen d’action et le HCRRUN met en œuvre ses recommandations. Aucun Togolais ne peut remettre en cause la loyauté et la hauteur d’esprit que portent ces institutions mises en place par l’État. Nous constatons juste qu’aux lendemains de leur accession au sommet de l’État, feu Kléber Dadjo et Son Excellence Faure Gnassingbé ont eu la même préoccupation : réconcilier les Togolais pour préserver la paix.
Le HCRRUN est une institution de l’État togolais avec une feuille de route, dont entre autres, rendre hommage à certaines personnalités disparues qui ont occupé des postes de responsabilité importante, comme Kléber Dadjo. Le HCCRUN est en relation avec la famille de feu Kléber Dadjo. Nous soutenons l’abnégation du HCRRUN et nous militons pour une inclusion proactive étendue des veuves et de tous les enfants de l’illustre disparu dans le processus.
Nous, “Association Kléber Dadjo pour la paix”, sommes un acteur de la société civile, non étatique, doté d’une personnalité morale. Notre vision est de mieux faire connaître Kléber Dadjo et tous ses compairs par les jeunes générations, mais aussi de poursuivre leur vision : ensemencer la paix partout et particulièrement chez les jeunes.
Notre association reconnait des points d’intérêts communs avec le HCRRUN et elle milite pour des échanges avec les acteurs étatiques et non étatiques sur la thématique du « rendre hommage aux anciens » et d’« ensemencer la paix au Togo ».
Pour conclure cet entretien, M. Rabas
Une observation attentive des crises multiformes et multisectorielles sur la planète démontre que la paix régionale et mondiale est menacée. Il est temps d’en appeler à toute l’ingéniosité de l’Homme pour faire triompher la paix. En ces moments de turbulence et de menaces sur la paix, nous lançons un appel à toutes les Togolaises et à tous les Togolais pour une union sacrée autour du chef de l’État et de l’armée pour faire triompher la paix.
Nous devons raviver les discours de la paix, nous devons dialoguer et ensemencer la paix partout et surtout au cœur de la jeunesse. C’est le sens de notre projet portant sur la création d’une « Fondation Kléber Dadjo pour la paix ». Ce projet vise également à répondre aux dernières volontés de feu Kléber Dadjo résumées en cette phrase : « Nous avons sacrifié notre vie sur les champs de guerre pour arracher la paix et vous avez le devoir de sacrifier tous les efforts pour maintenir cette paix ». Voici les dernières volontés d’un ancien chef d’État du Togo, ancien officier des Forces françaises libres du général de Gaulle, avant de quitter cette terre.
Nous invoquons les mânes de nos ancêtres pour que la paix règne sur la terre de nos aïeux.