Un enseignant a été décapité vendredi à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) et son agresseur présumé tué par la police, dans la ville voisine d’Eragny (Val-d’Oise), trois semaines après l’attaque au hachoir perpétrée par un jeune Pakistanais près des ex-locaux de Charlie Hebdo à Paris. Le président Macron s’est rendu sur place.
Selon une source policière, la victime, un professeur d’histoire du collège du Bois-d’Aulne à Conflans Sainte-Honorine, avait montré récemment à ses élèves des caricatures de Mahomet en cours.
Le parquet national antiterroriste a annoncé à l’AFP s’être immédiatement saisi de l’enquête, ouverte pour « assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste criminelle ».
Les investigations ont été confiées à la Sous-direction antiterroriste (Sdat) de la police et à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).
Les faits se sont déroulés vers 17h00, près d’un établissement scolaire, selon une source policière. Les policiers de la brigade anticriminalité de Conflans Sainte-Honorine ont été appelés pour un individu suspect rôdant autour d’un établissement scolaire, selon cette source.
Sur place, les policiers ont découvert la victime et, 200 mètres plus loin à Eragny, ils ont tenté d’interpeller un homme armé d’une arme blanche qui les menaçait et ont fait feu sur lui.
L’agresseur présumé, dont l’identité n’a pas été immédiatement établie, est décédé, a-t-on indiqué de source judiciaire. Un périmètre de sécurité a été installé et le service de déminage appelé, en raison d’une suspicion de gilet explosif.
Cellule de crise
Emmanuel Macron s’est rendu ce vendredi soir à Conflans-Sainte-Honorine. Le chef de l’Etat était accompagné du ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, de la ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa et du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.
« Un de nos concitoyens a été assassiné aujourd’hui parce qu’il enseignait, parce qu’il apprenait à des élèves la liberté d’expression, la liberté de croire et de ne pas croire », a dit le président, l’air sombre, devant le collège du Bois d’Aulne.
« Il a été victime d’un attentat terroriste islamiste caractérisé », a insisté le chef de l’Etat, ajoutant que « l’obscurantisme et la violence qui l’accompagne ne gagneront pas ». « Ils ne passeront pas », a-t-il martelé, appelant la nation à « faire bloc ». « Cette unité est indispensable », a-t-il dit au terme d’une courte allocution d’un peu moins de cinq minutes.
Auparavant, Emmanuel Macron s’est rendu à la cellule de crise mise en place au ministère de l’Intérieur, où il a été rejoint par le Premier ministre, Jean Castex. Le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti, s’y trouvait également.
De nombreuses réactions
L’attaque a suscité de nombreuses réactions politiques : « barbarie insoutenable » pour la présidente du Rassemblement nationale, Marine Le Pen, « ignoble crime » pour le leader de LFI Jean-Luc-Mélenchon et « horreur absolue » selon le numéro un de LREM, Stanislas Guerini.
L’ancien Premier ministre Manuel Valls, en première ligne lors de la série d’attentats qui ont frappé la France en 2015, a considéré qu’ « un pas supplémentaire (avait) été franchi par le fondamentalisme islamiste ». « Les grands discours doivent céder la place aux grandes décisions contre le terrorisme islamiste », a pour sa part exhorté le patron de LR, Christian Jacob, 15 jours après le discours ferme d’Emmanuel Macron sur les séparatismes qui doit être suivi d’un projet de loi en décembre.
A l’Assemblée nationale, dans une ambiance empreinte d’émotion, les députés se sont levés pour dénoncer un « abominable attentat ». Très affecté, le président de séance Hugues Renson (LREM) a pris la parole juste avant l’interruption des débats à 20h00. « Nous avons appris avec effroi l’abominable attentat qui s’est produit. Au nom de la représentation nationale, en notre nom à tous, je tiens à saluer la mémoire de la victime », a-t-il souligné.
Cette attaque survient trois semaines jour pour jour après l’attentat au hachoir perpétré par un jeune Pakistanais de 25 ans devant les anciens locaux de Charlie Hebdo, qui avait fait deux blessés graves.
L’auteur de cet attentat islamiste avait déclaré aux enquêteurs avoir agi en réaction à la publication et la republication par Charlie Hebdo début septembre des caricatures de Mahomet, qui avaient fait de l’hebdomadaire satirique une cible des jihadistes.
Cette republication avait eu lieu à l’ouverture le mois dernier du procès des attentats de janvier 2015, qui doit se tenir jusqu’au 10 novembre. En réaction, des milliers de manifestants avaient protesté dans plusieurs villes du Pakistan contre Charlie Hebdo et la France. Al Qaïda avait également menacé d’attaquer de nouveau la rédaction de l’hebdomadaire satirique.
Depuis la vague d’attentats jihadistes sans précédent amorcée en 2015 en France, qui avait fait 258 morts, plusieurs attaques ont été perpétrées à l’arme blanche, notamment à la préfecture de police de Paris en octobre 2019 ou à Romans-sur-Isère en avril dernier.
(Avec AFP)