La décentralisation, un processus ambitieux entamé au Togo en 2019, se heurte à un obstacle majeur : l’insuffisance de professionnels qualifiés dans les 117 communes du pays. La pénurie d’ingénieurs et d’architectes par exemple met en péril la qualité des constructions et expose les populations à de graves risques, comme l’ont souligné lundi dernier l’Ordre national des ingénieurs du Togo (ONIT) et l’Ordre national des architectes du Togo (ONAT).
En transférant de nouvelles compétences aux communes, notamment en matière d’urbanisme et de contrôle des constructions, les autorités ont voulu rapprocher les appareils décisionnels des citoyens. Cette réforme, quoique salutaire à bien d’égards, trouve quelques difficultés dans sa mise en œuvre dans les administrations locales. Les communes se retrouvent démunies face à leurs nouvelles responsabilités, manquant cruellement de ressources humaines et techniques nécessaires pour assurer le suivi des projets de construction.
Des conséquences dramatiques
Les conséquences de cette situation sont déjà palpables. De nombreux incidents liés à des défauts de construction ont été recensés à travers le pays, causant parfois des pertes en vies humaines. Dernier cas recensé, l’effondrement d’un immeuble R+5 en construction au lieudit carrefour Sanol Sagbado occasionnant des pertes en vies humaines et d’importants dégâts matériels. Ces tragédies sont le résultat direct d’un manque de contrôle et d’une absence de compétences pour évaluer la qualité des ouvrages. Ce diagnostic fait, l’ONIT et l’ONAT appellent les autorités à mettre en place des programmes de formation et à recruter des experts pour soutenir les municipalités dans ces missions d’utilité publique.
Les défis à relever
En vue de permettre aux mairies de jouer un rôle clé dans l’octroi des permis de construire et dans la surveillance des chantiers, il est nécessaire de doter les services techniques d’ingénieurs ou d’architectes capables d’évaluer la faisabilité technique des projets et de vérifier la conformité des constructions aux normes en vigueur; équiper les mairies de logiciels de conception assistée par ordinateur, d’appareils de mesure et d’autres outils indispensables, et enfin, mettre l’accent sur la formation.
Un appel à l’action
Face à cette situation alarmante, les ordres professionnels lancent un appel pressant aux autorités. Ils demandent :
• Le renforcement des capacités des administrations locales : des programmes de formation doivent être mis en place pour former les agents communaux aux normes de construction et aux procédures d’évaluation des projets.
• Le recrutement de personnel qualifié : les communes doivent être dotées des ressources humaines nécessaires pour assurer un suivi rigoureux des constructions.
• La mise en place de mécanismes de contrôle : des inspections régulières des chantiers doivent être organisées pour s’assurer du respect des normes de sécurité.
La décentralisation est un processus fondamental pour renforcer la démocratie et améliorer la gouvernance locale. Cependant, pour réussir, elle doit être accompagnée de moyens adaptés. Les autorités doivent prendre conscience de l’urgence de la situation et mettre en œuvre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des citoyens. La question de la qualité des constructions est un enjeu de sécurité publique.