Comment l’OTR met à genoux les 117 communes

Le processus de décentralisation entamé avec une forte dynamique optimiste est confronté à une mine de difficultés qui fragilise l’engagement des collectivités territoriales à relever les défis d’un développement harmonieux. Le mécanisme de financement des communes semble grippé, et met ces dernières sur les rotules.

Le fonctionnement des communes est financé par des transferts de l’Etat et des ressources propres à chaque commune. On entend par ressources propres l’ensemble des ressources fiscales mobilisées par l’Office togolais des recettes (OTR) pour le compte des collectivités territoriales d’une part, et les différentes taxes collectées par le comptable des collectivités d’autre part. Une bonne partie ou l’intégralité des ressources fiscales et non fiscales mobilisées par l’OTR est reversée aux communes et autres entités des collectivités territoriales sous forme de ristournes. Cette répartition, qui existait du temps des délégations spéciales, est consolidée depuis le 14 avril 2021 par un décret présidentiel qui en détermine les clés, précisément le décret N°2021-039/PR fixant les taux de répartition des recettes fiscales et des recettes de prestations de services entre les communes, les Districts autonomes, le Fonds d’appui aux collectivités territoriales et l’Agence nationale d’assainissement et de salubrité publique (ANASAP).

C’est ainsi que la taxe de voirie, la taxe sur la distribution de l’eau, de l’électricité et du téléphone, la taxe d’habitation, la taxe de péage au cordon douanier, entre autres, collectées par l’OTR sont à 100% reversées aux communes, tandis que, notamment sur la Taxe professionnelle unique (TPU), elles perçoivent 90%, 20% sur la taxe sur les produits de jeu de hasard, 50% sur la patente. Au titre des recettes non fiscales, les communes perçoivent 60% des redevances d’exploitation des carrières et mines, 75% des taxes d’inspection sanitaire des produits alimentaires, 75% sur les redevances de vidanges et de curage des caniveaux et fosses septiques… Mais pardi ! Le reversement des ristournes se révèle un casse-tête.

Circuit de reversement en panne?

Les ressources endogènes sous l’emprise du décret N°2021-039/PR sont bel et bien engrangées par l’OTR, même avec une efficacité exemplaire. Mais le circuit de reversement de la quote-part des communes est si long. D’après un membre du conseil exécutif d’une commune de Lomé qui a requis l’anonymat, cela fait six mois qu’un seul franc, au titre de ces ristournes, n’est perçu par sa commune. Toutes les autres communes, d’après nos informations, se trouvent dans le même cas, et tirent le diable par la queue pour actionner leur fonctionnement, dans un contexte économique déjà difficile où elles doivent relever à la base des défis existentiels. Or, les budgets annuels des différentes communes sont prévisionnellement financés par les ristournes de l’OTR à hauteur de 75 à 80%.
Le comble, il se pose un problème de communication autour de ce sujet, puisque l’OTR n’a jamais donné suite favorable aux requêtes de certains maires curieux de savoir quel est le montant réel des ressources collectées dans leur ressort territorial. Aussi les fichiers des contribuables des communes ne sont-ils jamais mis à la disposition des conseils exécutifs.

Aussi longtemps que les opérations d’assiettes et de recouvrement seront concentrées au seul niveau de l’OTR, et que les collectivités locales ne seront pas impliquées dans le processus, la décentralisation aura de la peine à atteindre avec efficacité ses objectifs.

3 thoughts on “Comment l’OTR met à genoux les 117 communes

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