AS FAR-ASKO : éviter la navigation à vue et retrouver de la cohérence tactique…

Après l’entame ratée de sa nouvelle campagne de Ligue des Champions de la CAF, le club togolais Asko de Kara va déclencher une opération commando pour remonter un but au compteur, et clouer au pilori l’AS FAR dans son fief. Les Kondona ayant posé plus tôt leurs baluchons en terre marocaine vont jouer leur survie dans cette compétition demain samedi 26 août dès 19h à Marrakech.

A la manche aller à Lomé, les Jaune et Noir ont affiché une fébrilité collective. Méconnaissables en première partie, ils changent de visage au retour des vestaires mais vont animer un festival de buts ratés, dans un système de jeu bizarrement recomposé.

En première partie, le technicien Amani Yao propose un 4-3-3, mais dans le déroulé pratique, on lisait autre disposition, plutôt un 4-5-1. Une défense classique, avec Magnime Agbotcho, Kangnivi Ama Tchoutchoui (dans l’axe), Roland Amouzou et Abdoul-Sabourh Bode dans les couloirs. Le milieu bien étoffé est animé par cinq joueurs dont Wome Dove placé juste derrière l’attaquant de pointe, Harissou Ouro-Bodi et Issa Keita en ailiers gauche et droit, la récupération assurée par Enoch Quaicoe et Novon Efoe, Amara seul largué sur le front de l’attaque.

A priori, cette disposition est un monstre défensif qui vise à assurer la maîtrise du jeu au milieu, avec une bonne coordination des cinq joueurs du milieu chargés de harceler le porteur du ballon haut sur le terrain, avec la possibilité de miser le jeu offensif sur les flancs. A travers ce choix tactique, Amani Yao semble jouer la carte de la prudence, et affiche son projet de résultat, ne pas encaisser de but au pire des cas.


Animation approximative

L’animation du jeu va révéler quelques défaillances. D’abord sur les transitions offensives, la défense a assez de difficultés pour les sorties de balle, le milieu de terrain perd assez de temps pour déclencher les assauts offensifs en donnant trop de latéralité au jeu ou simplement en revenant en arrière, et Amara en pointe ne se distingue pas aussi par ses déplacements pour offrir des possibilités de jeu en profondeur.

Asko réussit à réduire l’espace entre chaque compartiment du jeu, les transitions et la circulation du ballon semblent plus simples, mais il manque un dépositaire du jeu qui prend des initiatives, qui peut mettre sur orbite l’attaquant de pointe, rôle visiblement confié à Wome Dove, mais qu’il n’a pas pu assumer, jouant trop dos à la défense, la créativité en berne.

Le jeu est trop concentré en milieu de terrain, la liaison milieu-attaque s’avère défectueuse, ce qui oblige Amara à descendre bien souvent d’un cran pour se battre et récupérer la balle. Or, s’il y arrive, il favorise des combinaisons qui aboutissent à des passes qui tombent dans sa zone de prédilection, inoccupée. Preuves, Harissou, lancé depuis le milieu de terrain à la 30′, se retrouve à la lisière de la surface de réparation, il lève la tête, aucun coéquipier dans la surface de réparation, il opte pour une frappe, si faible pour inquiéter El Mehdi Benabid. Le même Harissou, dans les mêmes configurations, hérite encore d’une balle à la 43′, sur le côté droit de la surface de réparation, il va essayer encore la même solution, pour le même résultat.

Asko est parti sur un projet de jeu qui crée normalement la supériorité numérique en défense, ce qui oblige l’adversaire à jouer haut à la récupération, ce qui laisse d’énormes espaces à exploiter, mais le hic, les joueurs d’Asko ont du mal à se projeter vite, pour faire le surnombre en attaque, surtout dans la surface de réparation.

Faits marquants dans cette première partie, peu après le but encaissé à la 18e, Wome Dove est repositionné en milieu extérieur droit, Harissou repositionné à sa place, or peu avant, Harissou et Issa Keita ont effectué une permutation. Des indices qui dénotent d’un embrouillamini tactique, et qui prouvent à suffisance que le coach Amani navigue en vue pour le moment, – ne connaissant pas bien son groupe-, mais il reste déterminé à trouver la juste solution.

Du mieux en 2e partie, mais…

Le passage au vestiaire a permis à Asko de faire certains réglages, notamment le basculement radical de la disposition tactique qui se mue en un 3-5-2 avec à la base un certain Efoe Novon, Amatchoutchoui et Magnime. Quelques changements ont été opérés. Wome et Faride Tchadenou s’installent devant la défense, Moussa Marone fait son entrée, assure la liaison entre le milieu et l’attaque, Terry Sackor et Robert Kouyara sur le front de l’attaque, et plus tard Wome, vraiment transparent, va céder sa place à Ulrich Quenum.

Novon, dès la 2e minute, entame mal son nouveau rôle, en favorisant une chaude alerte qui offre un caviar à Ismael Agoro, heureusement Drissa Kouyate tenait bien sa cage.

Progressivement, Asko stabilise son jeu, les enchaînements deviennent plus cohérents et le jeu offensif retrouve plus de profondeur, les transitions offensives sont mieux gérées, sous l’égide de Moussa Marone. Très remuant, meilleur que Wome dans ce registre, il se retrouve à gauche, à droite, au milieu, multiplie les incursions et offre plusieurs solutions offensives, notamment aux 60′, 64′, mais Terry Sackor et Robert Kouyara s’illustrent par leur inefficacité ou leur absence. Asko va axer ses assauts offensifs sur le flanc droit, à la 76′ par exemple, une action rondement menée se termine par un merveilleux centre de Abdoul-Sabourh Bode depuis ce flanc, mais aucun preneur dans la surface de réparation.

Si Asko montre un meilleur visage en cette 2e partie, il pèche dans la gestion du rythme de jeu, surtout lors des transitions offensives, la lenteur dans la progression de la balle permet à l’adversaire de replier et de fermer les espaces.

Et demain?

Stratégiquement, Amani doit retrouver de la cohérence tactique, pour asseoir un projet de jeu plus intelligible, en vue de faciliter une meilleure maîtrise des débats à ses joueurs de bout en bout, tout en insistant sur la discipline tactique. Car il faut le préciser, plusieurs joueurs ont un niveau tactique peu relevé.

Alors demain, quel que soit le système adopté par Amani, les Kondona auront besoin d’assurer l’arrière-garde, et en faisant le choix de gagner, ils doivent ouvrir le jeu et activer l’efficacité offensive. Pour ce faire, ils auront besoin d’un métronome de jeu, avec un profil de joueur accompli, fluide techniquement, pour optimiser la relation milieu-attaque, si jamais ils choisissent d’évoluer par exemple en 4-5-1 ou en 3-5-2. Celui-ci serait un joueur d’interlignes, qui va savoir bien s’orienter et se positionner, et être là pour lancer des joueurs dans le dernier tiers dans l’idéal. Puis, il va suivre les actions et essayer de finir souvent sur des centres en retrait. C’est lui qui arrive en trailer à l’entrée de la surface, à la Lampard, pour mettre des frappes à mi-distance. Le manque de frappes puissantes cadrées, depuis l’axe, est l’autre péché d’Asko identifié à Kégué. Wome avait assuré cette fonction à la manche aller, mais n’y a pas brillé.

En attaque, il faut limiter le périmètre d’action de l’attaquant ou des attaquants dans l’axe, pour éviter la débauche d’énergie dans la chasse au ballon dans l’entrejeu et renforcer leur présence dans la surface de réparation.

Sur un plan global, il faut améliorer la vitesse d’exécution des phases offensives. Le niveau technique doit être relevé, pour éliminer les déchets tels les mauvaises passes, les mauvaises relances, de même que les mauvais dédoublements. A kégué, on a pu voir un joueur d’Asko transmettre une passe sur le flanc droit et passer devant son coéquipier pour aller s’engouffrer au milieu des adversaires, alors qu’il y avait un boulevard derrière le porteur de balle.

En défense, éviter les fantaisies et des prises de risque inutiles, et jouer simple. Aussi bien en milieu de terrain qu’en défense, éviter de laisser assez d’espace aux adversaires, qui peuvent faire sans opposition des contrôles et des frappes. Ce manquement explique au mieux le but encaissé à Kégué.

Aussi la question de la concentration devrait-elle être réglée. Le match se joue à toutes les secondes jusqu’au coup de sifflet final. A kegue, l’on avait remarqué une baisse d’intensité criarde dans les dernières minutes (la fatigue serait passée par là), et AS FAR, dominée entre-temps, a repris le contrôle des affaires, loupant de peu le but du break aux 88′ et 90′.

Revenir au pays, qualifiés pour le prochain palier de la ligue des champions, n’est pas mission impossible. Allez les kondona, Allez les Jaune et Noir!!!

Yves GALLEY